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Caraïbes amers

Caraïbes amers

Pour les couvertures de ses romans, Le Muscadier affectionne les couleurs flashy. En découvrant ici, se découpant sur le vert vif d’un entrelacs de hautes tiges, le visage d’un adolescent au demi sourire affable, un lecteur non averti pourrait s’attendre à entrer dans un roman « sentimental » se déroulant dans un pays « exotique ». Le titre de la collection – Rester vivant – imprimé bien en évidence, suffira peut-être à le détromper. Christophe Léon est le directeur littéraire de cette collection « qui parle du monde d’aujourd’hui »...

Caraïbes amers / Vinciane Moeschler
Le Muscadier ; coll. Rester vivant
196 p. – 2022 . – 13,50€   ISBN 978-10-96935-96-3

Pour les couvertures de ses romans, Le Muscadier affectionne les couleurs flashy. En découvrant ici, se découpant sur le vert vif d’un entrelacs de hautes tiges, le visage d’un adolescent au demi sourire affable, un lecteur non averti pourrait s’attendre à entrer dans un roman « sentimental » se déroulant dans un pays « exotique ». Le titre de la collection – Rester vivant – imprimé bien en évidence, suffira peut-être à le détromper. Christophe Léon est le directeur littéraire de cette collection « qui parle du monde d’aujourd’hui ». Ceux et celles qui connaissent les romans et les nouvelles de cet auteur se douteront que le roman qu’ils s’apprêtent à ouvrir sera sans doute « solide » et qu’il dénoncera au passage une situation révoltante. Ils n’auront pas tort !
Jusqu’à présent Sacha, le jeune narrateur, vivait au sein d’une famille aisée et – comme on dit – sans histoire :  sa mère est médecin et son père journaliste. Mais voici que ce dernier est licencié pour des raisons économiques et qu’un poste de correspondant à Saint-Domingue s’offre à lui. La mère est ravie de changer d’air et de prendre un brin de repos. Quant à Sacha, l’idée d’être séparé de ses copains, le rend plus que réticent. Mais autour d’eux, ce ne sont que paroles flatteuses pour cette République dominicaine au climat de rêve et aux plages paradisiaques. Le débarquement et l’installation à Saint-Domingue introduit déjà quelques bémols dans l’enthousiasme du départ. Mais ce n’est qu’un début : lorsque Sacha et sa mère décident de découvrir le pays, ils tombent rapidement sur l’une de ses faces cachées : les conditions de vie et de travail dans les plantations de canne à sucre. Les ouvriers saisonniers y sont en grande partie des Haïtiens. Recrutés ou clandestins, ils vivent misérablement dans des campements appelés bateys. En République dominicaine, ces bateys sont généralement des bidonvilles.  
À partir de cette découverte, le roman prend une nouvelle dimension. Pour Sacha, on peut parler d’un parcours initiatique qu’il mènera en compagnie de nouveaux amis, Enrique, le fils du concierge du lycée et Patria, une jeune femme de 17 ans et sa toute petite fille.    
De nationalité franco-suisse, Vinciane Moeschler, qui vit à Bruxelles, a passé plusieurs années en République dominicaine. Elle qui aime « dénoncer le monde, gratter là où ça fait mal, sentir vibrer notre planète, se poser des questions sur notre société », dispose pour ce faire, d’un vrai talent de narratrice. Donnant vie à des personnages crédibles. Imaginant des péripéties éclairantes.
Caraïbes amères est un roman passionnant ! (Maggy Rayet)