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Le jour où j’ai rencontré Julietta

Le jour où j’ai rencontré Julietta

Accueillir un animal, quelle aventure émotionnelle ! L’arrivée d’un nouveau membre de la famille, c’est un événement à la fois joyeux et excitant, impressionnant et remuant aussi. Il faut l’approcher, lui faire une place, l’éduquer parfois, l’apprivoiser toujours. La maman de Max a pris la grande décision d’adopter un des treize chiots de la dame de la ferme, nés un soir de pluie. Quand elle l’annonce à ses enfants au coucher, ceux-ci réagissent différemment :...

Le jour où j’ai rencontré Julietta / texte et illustrations de Martina Aranda
Pastel, l’école des loisirs
n.p. – 2023 . – 12€   ISBN 978-2-211-3246-56

Accueillir un animal, quelle aventure émotionnelle ! L’arrivée d’un nouveau membre de la famille, c’est un événement à la fois joyeux et excitant, impressionnant et remuant aussi. Il faut l’approcher, lui faire une place, l’éduquer parfois, l’apprivoiser toujours. La maman de Max a pris la grande décision d’adopter un des treize chiots de la dame de la ferme, nés un soir de pluie. Quand elle l’annonce à ses enfants au coucher, ceux-ci réagissent différemment : l’aînée se réjouit à l’idée de toutes les promenades à venir, tandis que le cadet, lové contre son ventre chaud, verbalise sa peur des chiens. D’ailleurs, le lendemain matin, lors du déjeuner qui sent bon le café, Max paraît tout penaud devant son jus de pommes (mais il vérifie quand même si les verres sont bien au même niveau). Heureusement, l’intervention d’Amaryllis, avec ses longs cheveux noirs bouclés qui lui donnent des airs de caniche, l’oblige à sortir de sa torpeur : elle leur propose une balade dans les bois. Comme « elle connaît les chants des oiseaux, les noms des champignons, toutes sortes de limaces », le divertissement est total. Toutefois, le garçonnet demeure en retrait, quelque peu chagrin, malgré les dés de chou rouge qui le ravissent d’habitude. Lorsqu’ils rentrent à la maison, Julietta est là… Max s’éloigne tout de suite et demande si elle va rester longtemps, ce à quoi sa maman lui répond : « Elle va rester. »

C’est ce moment de transition que Martina Aranda évoque dans Le Jour où j’ai rencontré Julietta. L’autrice-illustratrice a choisi, avec intelligence, de décentrer le point de vue en confiant les rênes de la narration à la grande sœur qui observe les réactions de Max et de la chienne avec acuité, et s’exprime par des paroles rassurantes. Sans juger ni brusquer, elle dialogue avec Max, dont elle respecte les appréhensions tout en le poussant à les dépasser : « Il ne faut pas avoir peur de Julietta, Max. Je n’avais pas peur de toi quand tu es arrivé. […] J’avais préparé un goûter. Est-ce que tu te souviens comme j’étais gentille même si je ne te connaissais pas ? C’est ça qu’il faut faire avec Julietta. » D’autant que la chienne, elle aussi, est bousculée par ces changements. Il suffit de la regarder pour s’en rendre compte : elle cherche la présence et l’affection, tente de trouver ses marques… et fait ses besoins partout. Le doudou du garçon pourrait la réconforter un peu, non ?

Tout est délicat, dans cet album aux deux courts chapitres. Les personnages, les couleurs pastel, le dessin, le propos. Sans lourdeur explicative et avec une généreuse sensibilité, Aranda montre, simplement, une situation problématique du quotidien d’un enfant et une des manières de l’aborder. Empathie, patience, complicité et sourire se révèlent les meilleurs dissipateurs de peurs… Le Jour où j’ai rencontré Julietta se déguste telle une praline onctueuse et, dès la dernière page tournée, gourmand, on ne désire qu’une seule chose : recommencer ! (Samia Hammami)